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Mise en scène

De l’adaptation à la mise en scène

"Kazem Shahryari assiste à une lecture du texte et décide… de le monter mais en se l’appropriant.
Il a l’idée non plus d’une comédienne sur le plateau mais de deux. Outre Fatima, il appelle Dominique CHAUGNAUD

La psychiatre mal dégrossie chargée d’examiner le futur condamné à mort de Lethal Romance - Mortelle rapsodie (texte de Jocelyne Sauvard, monté par Kazem en 2000), la grand-mère qui veut croire à un miracle pour sauver sa petite-fille dans Prodige (texte de Dermot Bolger, monté par Kazem en 2002), la petite sœur devenue vieille de Ombres et lumières d’Avril (texte de Bolger monté par Kazem en 2003) tellement heureuse qu’un jeune couple et son bébé en attente viennent redonner vie à la maison du passé. Espérons que le passage du texte à la moulinette Shahryari ne soit pas vécu par l’auteur comme une défiguration mais, parlons moderne, comme une configuration. Un travail né de plusieurs envies et énergies. Un travail fait ensemble, c’est tout et dans le respect et la mise en valeur de chacune des individualités y prenant part. Monologue pour une comédienne, le texte devient une pièce à deux comédiennes. Longue tirade, le texte devient 16 tableaux. Comme à l’accoutumée, ce texte, Kazem ne va pas le monter tel quel. Il le décortique, le détourne, le retourne. Il y met sa patte, son empreinte, sa vision, s’octroyant le privilège de la grande latitude du metteur en scène. Rassurez-vous : il fait cela même avec les pièces dont il est l’auteur. Dans ses textes, il donne d’ailleurs très peu d’indications de mises en scène (peu ou prou de didascalies). L’univers de l’auteur, c’est une chose, celui du metteur en scène une autre.

On pourrait penser qu’on frise la schizophrénie quand l’auteur et le metteur en scène ne font qu’un. Ce n’est pas grave docteur : cela ne se fait pas en même temps, et puis si l’auteur, créateur solitaire, a le luxe et le déshonneur d’être seul face à sa feuille, le metteur en scène a le luxe et le grand honneur de diriger une équipe, d’orchestrer le travail d’hommes faits de chair et de sang, de composer avec leurs humeurs, leur bonne et leur mauvaise volonté, le tout selon des contingences financières et techniques… Un spectacle est toujours fonction de tellement d’impondérables, une telle gageure que c’en est émouvant. L’histoire d’une vieille qui ressasse ses souvenirs devient l’histoire de deux actrices qui essaient de cerner le destin d’une femme et qui finalement se font cerner elles-mêmes. Une femme seule sur un plateau face aux spectateurs devient deux femmes et des poupées devant plein de miroirs (réinstallation du quatrième mur). Texte absurde devient texte porteur de sens. Texte réel devient onirique (et si la vieille ne s’inventait toutes ces histoires que pour mieux se faire aimer ?). Texte de rancune et de haine devient texte d’amour et d’espoir.

Kazem Shahryari et l’Art Studio Théâtre sont heureux d’offrir un terrain d’expression au talent de Fatima Aïbout et de Ebrahim Makki avec la complicité bienveillante de la bonne fée Dominique Chagnaud.


Isabelle RENSON