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Hommage manifeste

Léo Ferré et les Oiseaux perdus d’Ici et Maintenant

1. « L’artiste est à descendre sans délais, comme un oiseau perdu le premier jour de la chasse. » C’est ce que Léo Ferré a écrit, et on a sifflé, on a crié à ses récitals, mais on l’a aimé, et ON LE CHANTE, on le pense, on l’appelle aujourd’hui, nous, les Oiseaux perdus. De quoi nous parle-t-il ? De révolte, d’amour, de mort, de musique. De poésie. Il lui rentre dedans, la caresse, la renverse, la transgresse, la protège, la porte. La poésie n’est plus fatale ou morte, mais mangée, bue et proférante. On croit que c’est de la Femme qu’il parle, de l’Anarchie, de la Révolte, du Sacré, de l’Amour. Lui, c’est de Poésie. Mots nus. Mots seuls. Mots à dire, crus, le monde et l’horreur.

2. De quoi parlons-nous, Oiseaux perdus et Public spolié ? De révoltes dont le monde est gros, de mort aussi, et si l’on ne parle pas poésie, on aime la parole libre, les idées qui vont avec, et qui doivent circuler, dans leur diversité, leurs genres et leurs styles PARTICULIERS. Léo Ferré n’est plus là ? Et alors ! Ses mots, ses musiques sont gravés, ils n’ont pas été tus. NOUS, SI.

3. « Le Poète qui ne se soumet pas est un homme mutilé. » dit Léo. Est-ce vrai, hommes, femmes, jeunes, de la scène, du livre, de l’emploi et du sans emploi ?

4. Ce qui est l’attendu, « C’est la Musique », dit Léo. Silence et harmonie, imbriqués l’un dans l’autre. À la musique, il a donné ses mains, son oreille, son corps, sa tête. À nous aussi. Et nous, OISEAUX PERDUS, PUBLIC SPOLIÉ, sommes-nous libres de donner, sans prévarication, souffle et musique des mots ? Et de faire NOS ÉCHANGES INTERACTIFS ? Sans obligation de vendre, pour L’ART, des casquettes, des canettes et de faire ingérence à l’on ne sait quelle sommation ? L’artiste ne pond pas de photocopie.

5. « La lumière ne se fait que sur les tombes » dit Léo. Méfions-nous donc des encensoirs éteignoirs. « Ils te tairont, les gens. » dit Léo. Et ils nous TAISENT.

6. Avec ce legs qu’il nous a laissé, nous, les Oiseaux-trapézistes de L’AST, nous nous jetons sans appréhension dans le vide. On la saisira du bout des ailes, cette perche qui nous permettra de survivre pour dire, dans sa DIVERSITÉ, L’ART et ses façons contradictoires. De la multiplicité naît l’essentiel : LA VIE, LA MORT, LA LIBERTÉ, L’ÊTRE, et pas uniquement l’avoir.

7. Mais ce qu’il NOUS FAUT, à nous, oiseaux perdus, auteurs, poètes, artistes, à plumes, à octets, à corps, à voix, à gestes, à musique, ce sont LES LIEUX de CULTURE, les MOYENS pour donner à voir, à lire, à vivre, à critiquer, l’Art et les idées. Qu’ils soient DONNÉS, REÇUS. ICI, MAINTENANT. DEMAIN. Nous avons devoir de TRANSMISSION. Obligation est faite à l’ART de ne pas mourir. Et à L’AST, réunis autour de Kazem Shahryari, dans une amitié de toujours - depuis qu’il a écouté Léo en Iran, ayant les ailes ligotées - et qu’il a volé jusqu’ici. Kazem, un Français qui crée THÉATRE, POÉSIE, MUSIQUE, ô magie ! Et avec LA PASSION LÉO, nous voilà renaissants. MERCI de CŒUR à toutes et tous, et à nos alter ego de l’ombre. Et pour le reste, on y va !

Jocelyne Sauvard, Avril 2011